Allons à Versoix
Mon club de fitness se trouve non loin de l’Aréna. Cette immense salle d’expositions qui reçoit de nombreux colloques. Chaque année le salon de l’auto de Genève y fait son apparition avec son flot ininterrompu de visiteurs, et, chaque année la circulation devient infernale. Alors, pendant ces quinze jours que dure cette manifestation, j’évite d’aller à mon entrainement habituel, pour choisir le club de Versoix qui est lui-même affilier au même ensemble des salles « Silhouette ». Ce vendredi soir. Eh oui c’est le vendredi soir que ce déroule, à cet endroit, le cours de body combat. J’arrive dans les vestiaires où la porte entrouverte semble bloquée. Je la pousse avec plus de fermeté pour entendre un gémissement. Réussissant malgré tout à me glisser par l’étroit passage disponible. Je vois deux hommes, des baraques, culturistes à la carrure impressionnante, allongés sur le sol en se tenant la tête. Que s’est-il passé. C’est alors que j’entends la voix de Mousse qui grommelle : -Bonjour Mousse, bonjour Mousse, non mais, on dit Bonjour MONSIEUR Mousse ! En me voyant, la bobine de mon copain s’éclaira de son plus beau sourire, puis il hurla cette invective aux deux hommes étendus. Cassez-vous de là ! Vous gênez Pierre qui ne peut pas entrer ! Les deux personnages, tout en se tenant leurs dos endoloris, décampèrent en vitesse. C’est alors que la tête de Bahram sortit de derrière l’un des vestiaires : -Eh, Pierre content de te voir ! Puis me montrant sa nouvelle batterie de couleur bleue, il ajouta. Elle est toute neuve, j’ai pu venir ici en un rien de temps, c’est beau les nouvelles technologies. La tronche de Manu apparut au-dessus de tout le monde et il se présenta dans une combinaison de ski de fond rouge vif : -Pierre, il faut croire qu’on s’est donné le mot, j’ai d’ailleurs mis ce nouvel ensemble rien que pour l’occasion. Après une petite discussion plaisante et amicale, nous nous dirigeâmes vers la salle de sport. Et, tous les quatre nous restâmes bouche bée. Devant nous, un florilège de femmes splendides remplissait de leurs beautés manifestes. C’est alors que nous entendîmes compter à côté de nous. C’était Manu qui avec difficulté, et, en s’aidant de l’agilité de ses doigts dénombraient les beautés immaculées : -Une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix, onze, douze, treize, quatorze ! - Quoi ! M’exclamais-je. Manu tu sais maintenant compter jusqu’à quatorze. Il me regarda, étonné lui-même par sa performance et ressaya sans succès ce qui était pour lui un véritable exploit. Mousse, en l’absence de Stan, avait tout de suite pris ses aises. Torse nu et à quatre pattes, il démontrait sa force avec les trois demoiselles qui, grimpées sur son dos gloussaient de plaisir. Bahram étalait son plus beau sourire et proposait à chacune des beautés qui l’entouraient d’aller faire un tour de vélo électrique avec lui. Moi-même, je restai très discret. Ma timidité naturelle et ma fidélité inconditionnelle, ne me permettant pas la moindre incartade. Manu me suivit dans le fond de la salle où nos regards nous permettraient une vue imprenable sur les déesses aux physiques évocateurs. C’est alors que notre prof, Gaby, arriva. Vous vous souvenez de Gaby, c’est la petite Gothique qui, dans le passé, avait épaulé notre ancien coach Dominique pour rapidement, voler de ses propres ailes. Pour moi, c’était toujours un plaisir de la voir, sa gentillesse et son entrain étaient certainement communicatif. Elle posa son crane fétiche, ce porte bonheur qu’elle aimait emmener avec elle, sur un coin de l’estrade et plantant son poignard à côté de lui elle expliqua aux nouvelles, les difficultés des exercices qu’elles allaient rencontrer. Et le cours commença. Que de problèmes à le suivre. Notre attention pour des raisons bien évidentes ne pouvaient pas se concentrer sur les routines, mais, chaviraient d’une Vénus à l’autre, oubliant la justesse des mouvements et la rythmique saccadée de la musique. Manu qui avait la tête qui tournait, faillit tomber à plusieurs reprises et son décompte tonitruant n’arriva plus à dépasser le chiffre trois. Bahram, la salive abondante, essayait de garder sa composition et calmer son excitation en lorgnant sur le seul homme habitué de la salle, un petit gringalet avec une tenue rose bonbon et une gestuelle féminine. Le cours terminé. Mousse, s’empressa de jouer de sa musculature impressionnant à nombre de beautés émoustillées. Quand soudain, un cri retentit derrière nous. C’était Stan qui le regardait furieuse : -J’en était sûre, les mecs, toujours les mêmes, on les quitte deux secondes des yeux et ils en profitent pour folâtrer. Elle prit mousse par l’oreille. Le pauvre bougre penaud émit un petit « Aie ! » de douleur et suivit Stan en trottinant à petits pas. Cet évènement mit un terme à nos envies et après une douche éclaire dans les vestiaires, notre séparation se fit sans la moindre civilité. Une semaine plus tard, je me pointais à ce club de Versoix, pour me retrouver seul au cours de body combat. Enfin, par seul, je veux dire sans mes trois acolytes habituels. Toutes les filles étaient là. En me voyant arriver, elles eurent un grand sourire, mais, voyant que mes compères ne me suivaient pas, elles me demandèrent : -Ils sont où les autres ? Je jouais l’innocence. -Quels autres ? -Et bien les beaux mecs, le musclé, le grand sifflet et l’homme aux sourires ? -Non ! Ils ne seront pas là ce soir ! Alors elles eurent une moue de tristesse et un haussement d’épaules avant de me tourner le dos. Dépité, j’osais alors ! -Mais vous savez, je connais Jean-Baptiste ! La réaction ne se fit pas attendre. Elles m’envoyèrent une volée de nom d’oiseaux et levèrent leurs index haut dans le ciel. Puis, j’entendis un cri de détresse, suivi de pleurs, c’était Anne, qui était dans la salle et que je n’avais pas aperçu. La pauvre détala immédiatement en pleurant. A la fin du cours, trois des plus jolies filles vinrent me voir. « Enfin des filles qui ont bon goût. ». Me dis-je ! Puis, je me mis à penser que je pourrais, peut-être, faire un accroc. Un tout petit accroc à ma maladive fidélité ! Alors, elles me demandèrent : -Pierre, pourrais-tu passer mon numéro de téléphone au gros costaud ! -Et moi, à l’homme au sourire ! -Et moi au splendide grand sifflet ! Dépité un instant. J’acquiesçai à leurs demandes et quittai la salle, heureux. Heureux ! Parce que. Bien évidement. Leurs coordonnées resteraient secrètement en ma possession. Un jour peut-être… Vive le body combat ! |