Chronique du body combat 33
Confidence
Une petite confidence peut
permettre d’éviter un incident diplomatique grave !
« Pierre, tu sais, j’ai mon odorat qui est
surdéveloppé ! ».
Il y a trente-cinq ans déjà…
Un petit village Gouloum-gouloum, perché sur les hauts
plateaux du désert Ethiopien.
Une petite fille à la longue chevelure et aux canines bien
développés court sur le sable brûlant,
elle s’arrête à
côté d’un immense cactus aux
épines acérées et l’escalade
sans la moindre peine, sans le moindre mal. Elle cueille
l’énorme fruit qui pourra, elle en est certaine,
nourrir ses vingt frères et sœurs. Puis, toute
heureuse elle retourne dans sa magnifique demeure familiale de plus de
trente mètres carrés,
fabriquée avec du rotin et de la bouse de gnous.
Dans le chaudron une belle jambe de Congolais cuit tranquillement.
Tous les enfants sont là, regardant avec envi la cuisson de
cette viande tant convoitée.
Elle s’exclame :
-Voyécebofruiamangé !
Sa mère immédiatement, lui arrache des mains et
le porte à sa bouche, puis c’est la
rué, chacun essayant de voler sa part.
Le père arrive, l’air grave et
réfléchi.
(Pour des raisons de simplicité je vais traduire la
conversation du « Gouloum-gouloum » en
Français.)
-Meskerem, ma petite, viens vers moi !
Elle approche en claquant des canines.
Le père continu :
-Demain, tu le sais, il va y avoir la compétition annuelle
de recherche de Congolais. Elle hoche de la tête et sourit.
Je compte sur toi pour gagner cette année. Nous avons besoin
de plus de viande pour nourrir notre petite famille. (Je dois vous
précisez, pour ceux qui ne le savent pas, que dans les
tributs Gouloum-gouloum la norme est de cinquante enfants pas famille).
T’es-tu bien entrainée ?
Elle acquiesce sans un mot.
La particularité des tributs Gouloum-gouloum est de ne pas
distinguer la différence de couleur entre le noir et le
blanc, par contre leur odorat et particulièrement
aiguisé, et, celui de Meskerem est exceptionnel et
lui permettra avec certitude de débusquer sans le moindre
problème l’énorme carcasse de Congolais
qui sera bien cachée...
Au petit matin, toute la tribu est là, prête
à gagner le gros lot.
Le top de départ est donné.
Tous les participants par petits groupes, choisissent comme direction
l’un des quatre points cardinaux.
Celui de Meskerem est très nombreux, tous connaissent le don
incroyable de la petite qui renifle à grand bruit en
élargissant ses narines. Mais elle court vite la bougresse,
et laisse ses poursuivants loin derrière elle.
Soudain elle s’arrête, l’odeur est trop
forte.
Elle se dirige vers une paroi aux rochers couleur ocre et à
quatre pattes, avec des grognements de satisfaction elle se met
à retourner la terre et trouve facilement le ventre de son
régal.
La tête plongée dans ses entrailles, elle se met
à déguster son met favori, met qu’elle
a bien mérité.
Après cinq bonnes minutes de gourmandise, son
père la sort de son logement festif :
-Eh, ma petite dit-il tout sourire, il faut en laisser un peu pour ta
famille.
La figure rougit par le sang, tenue par les pieds, la tête en
bas, elle gesticule sa colère, en mastiquant avec
acharnement son dernier morceau de boyau qui lui colle à la
bouche…
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L’O.N.U. recevait pour toute la semaine, des
communautés venues d’Afrique pour des
négociations économiques importantes.
Parmi les invités, il y avait une
délégation Congolaise.
Son émissaire était un gros homme, aux pieds
immenses, au ventre proéminant, à la
démarche lymphatique et à la bobine joviale. Il
était reconnu comme fin négociateur et sa
prestance évidente pouvait bien entendu, faire la
différence pour l’obtention des crédits
voulus.
Son travail astreignant représentait toute sa vie, mais il
avait une autre passion dévorante, un dérivatif
parfait.
Le Body Combat !
A son physique pataud on aurait pu croire être en
présence d’un inepte dévoreur de
hamburgers, mais, au contraire son apparence était
simplement génétique et une solide fondation
musculaire soutenait ses bourrelets disgracieux.
Il se tourna vers son assistant et lui fit cette demande :
-Fiston pourrais-tu me dégoter un cours de body combat pour
ce mardi soir !
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Ce mardi soir j’étais arrivé en avance.
J’étais tombé sur Meskerem qui me
présenta une partie de sa famille en me disant
qu’elle resterait dans la salle d’attente le temps
de la durée du cours.
Je fus surpris par leur attitude, car chacun d’entre eux
reniflait, à grand bruit, le nez en l’air.
Meskerem me dit que je ne devais pas y prêter
attention, qu’il y avait un fumet de Congolais qui trainait
dans le coin et que leurs instincts étaient plus fort que
tout !
Plus tard dans les vestiaires, j’aperçu
l’énorme Homme à la peau d’un
noir d’encre, l’Africain à la bidoche
surdéveloppée !
Je pense qu’il me trouva sympathique car il se
présenta à moi :
-Je suis Mgoula Boudawi ! Emissaire spécial du Congo,
spécialisé dans les questions
économiques. J’ai entendu qu’il y avait
un superbe cours de body combat ici, et, j’adore
ça!
J’acquiesçais avec le sourire, mais
réalisant soudain le danger qui le menaçait, me
mis à paniquer. « Meskerem et
à sa clique qui attend dehors ! »
Sans la moindre hésitation, je l’entretins sur le
mortel problème dont il risquait d’être
victime.
-Une femme, issue d’une tribu Gouloum-gouloum, participe
également au cours ! Lui affirmais-je d’une voix
Chevrotante.
Il se mit à trembler :
-Vite je dois partir !
-Non la moitié de son clan attend à
l’entrée du club.
-Alors je dois rester cacher dans les vestiaires ! Dit-il justement.
Sa conclusion était évidente, mais, en entendant
Mousse, Bahram et Manu discutés de l’autre
côté des vestiaires, une idée
fantastique vint à mon esprit :
-Monsieur l’ambassadeur, lui dis-je avec
déférence, il y a une solution pour tromper la
cannibale et vous permettre de participer au cours en toute
sérénité !
Sa bobine inquiète me regarda avec circonspection.
-Je vous demande d’attendre, un petit instant !
Je me rendis immédiatement auprès de mes amis.
Manu grognait sur le fait que sa machine à laver
étant en panne, sa combinaison de ski de fond
n’avait pas pu être nettoyée depuis une
semaine.
Mousse dégouté, devait réutiliser la
paire de chaussettes qu’il avait utilisé
à un entrainement du matin et Bahram se plaignait que sa
bouteille d’électrolyte qu’il utilisait
pour gonfler sa batterie, venait de se renverser dans son sac.
-Eh ! Les gars. J’ai besoin de votre aide !
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Quel beau mardi soir, mardi de félicité, de joie,
de bonheur.
Nous étions tous arrivé en même temps
devant la salle de Body combat.
Monsieur Mgoula Boudawi était avec nous.
Il portait la combinaison de ski de fond de Manu qui semblait vouloir
exploser sous la contrainte qui distendait son tissu.
Il portait comme chaussures les baskets de Mousse
complètement écornée
d’où lorgnaient ses doigts de pieds, arborait le
Marcel de Bahram qui recouvrait à peine son
nombril et utilisait mon serre tête.
En nous voyant arriver, les filles ne purent retenir leurs rires.
Manu avait pâle figure nageant dans un short
immensément trop large qu’il avait noué
autour de son ventre à l’aide d’une
ficelle,
Barham portait un t-shirt qui flottait son volume.
Mousse avançait en pingouin dans des godasses mesurant une
taille supérieure à cinquante.
Et, j’avais fait deux tours de crâne avec ce
bandeau inadéquat.
Mais, nous le savions.
Tout ceci était pour la bonne cause.
Nous en étions heureux et particulièrement fiers
d’aider et de sauvegarder
l’intégrité de notre nouvel ami.
Eh bien oui !
Meskerem à l’odorat si affuté serait
à l’évidence troublée par
nos odeurs mélangées.
Le cours commença.
Tout allait bien, le Congolais nous surprenait par sa prestance et son
agilité, tandis que Manu retenait son short qu’il
avait mal accroché, que Mousse pataugeait dans ses godasses,
que Bahram s’empêtrait dans son oripeau trop
évasé et que mon bandeau cachait mon regard.
Meskerem arriva soudain dans la salle, en retard comme à son
habitude.
Elle commença à nous suivre dans nos routines
sportives. Puis, ses narines se mirent à papillonner. Levant
son nez en l’air elle renifla de toutes ses forces, des
odeurs aux saveurs mélangées troublaient son
esprit. IL y avait cette odeur de Congolais qui la faisait saliver,
mais elle était mélangée à
d’autres moins appétissantes.
Son regard parcourut la salle, elle remarqua le gros homme, mais son
problème de vue ne lui permit pas de discerner sa couleur de
peau.
Elle le savait maintenant.
Un Congolais se trouvait dans la salle !
A quatre pattes, elle s’enfila parmi nous, renifla tout
d’abord les godasses de Mousse, qu’elle
lécha à plusieurs reprises, remonta ensuite
jusqu’à mon front pour humer sa transpiration,
puis ce fut le t-shirt de Bahram qu’elle frotta sur sa
figure, fit deux tours rapides autour de Monsieur Mgoula Boudawi
d’où émanait une odeur trop
prononcée.
Non se dit-elle : «
Sacélegransiflèquédevenutrègro
! »
Puis elle fut à côté de Manu, et
là, en humant son short, pour je ne sais qu’elle
raison, elle se méprit sur sa Nationalité.
Peut-être une odeur d’urine, un fumet de
défécation ?
Elle ne put s’empêcher de mordre son
arrière train.
Manu hurla sa douleur :
-Meskerem c’est moi Manu !
-Toipagransiflèmècongolèapétissant
!
-Mais non j’t’assure ! Dit-il en la repoussant
d’une main.
Alors, je me précipitai vers elle.
Manu heureux crut que je venais l’aider.
Et bien non, malicieusement, je me mis à crier !
-Croques ses roubignoles, tu nous débarrasseras enfin de sa
grosse voix !
C’est alors que toute la tribu affamée de Meskerem
déboula dans la salle, s’attaquant à
toutes nos odeurs confondues.
Et ce fut la panique générale.
Notre débandade fut épique et, nous en portons
tous, les traces de morsures.
Mais !
Par bonheur !
Notre nouvel ami parfaitement protégé par son
accoutrement malodorant ressortit totalement indemne de
l’aventure !
Vive le body combat.
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