Le plus rapide
Etre second, n’est pas vraiment mon truc. C’est presque viscéral, maladif, je me sens tourmenté jusqu’à ce que le Graal de la première place arrive enfin. On était mardi soir, ce soir béni du body combat. Le cours venait de se terminer sous cette charmante phrase de fin que nous envoya Fanny notre coach: -Passez une bonne semaine comme dirait l’autruche. Restant dans une certaine expectative devant cette heureuse affirmation. Je me dépêchai de partir en direction des vestiaires en laissant impoliment Meskerem qui me contait, avec passion, les gouts culinaires de sa tribu cannibale d’Ethiopie : -Tu sais Pierre, disait-elle, on préfère la viande des Français comparée à celle Suisse qui est beaucoup trop mole à notre gout! Rapidement, je me débarrassai de mes oripeaux de sportif, puis une rapide douche, et, je laissai, sans le moindre mot, mon copain Manu qui venait à peine d’enlever son T-shirt. J’escaladai quatre à quatre les escaliers de fer qui m’emmenèrent dans la salle d’entrée du club. Et ! Je pâlis ! Une fois de plus elle était là confortablement assise dans un large fauteuil me regardant avec des yeux qui me semblèrent moqueurs. C’était Stan, la jolie Stan qui me mirait ainsi. Je balbutiai ma surprise : Mais comment as-tu fait pour être si rapide, on a quitté la salle de sport en même temps ! Elle ne dit rien, juste un petit sourire qui m’angoissa un peu plus. Il fallait que je comprenne. Alors je pris la décision de m’asseoir à côté d’elle. J’approchai, un peu trop prêt, mon minois de sa jolie chevelure, pensant humecter une odeur fétide, mélange de transpiration et de déodorant mal dosé. Mais non. Un léger parfum des plus agréables naviguait autour d’elle, ses cheveux flottaient dans la brise d’un léger courant d’air, son teint semblait frais, son maquillage au cordeau, le bleu de ses paupières et son rouge à lèvres fraichement alignés. Elle allait entamer la conversation, quand, vexé, tel un gougea je la laissai avec un inélégant mouvement d’épaules. Une semaine plus tard… On était mardi soir, il avait été décidé de terminer notre entrainement par une sortie de groupe au restaurant. Le cours touchant à sa fin, je sortis précipitamment de la salle. Cette fois si, je ne me laisserai pas faire. Couvert de sueur, j’enlevai mes nippes sportives, et sans même une douche vraiment nécessaire, j’enfilai avec peine mes vêtements qui collaient à ma peau gluante, mis ma chemise à l’envers et édulcorai l’évidence de mon slip de rechange. Je sortis précipitamment des vestiaires, bousculant même, Manu, Mousse et Barham qui surpris me demandèrent : -Mais Pierre, tu ne viens pas au resto avec nous ce soir ? -Si, si ! Leur répondis-je essoufflé. Je vous attends en haut ! Et cette fois ci j’étais bien le premier. Alors, j’entrepris de me prélasser dans l’un des grands fauteuils confortables en attendant le groupe. Devant son comptoir, le manager du club se mit à renifler à petite goulée, sa bobine distordue par une grimace de dégout. Il interpela, ainsi, sa collaboratrice : -Faudra penser de dire à l’entreprise de ménage de nettoyer à fond notre salle de réception ! J’attendis au moins une bonne vingtaine de minutes pour que l’ensemble du groupe arrive. Seule Stan n’était pas là ! -Dis donc Mousse, demandais-je. Stan ne vient pas avec nous ce soir ? Reculant de deux pas à mon approche, il répondit. -Non, elle a décidé de continuer son entrainement, elle nous rejoindra au restaurant dans une petite heure ! Raté ! Tous ces efforts, cette urgence dégoutante n’avait maintenant plus aucun intérêt. Ce soir-là personne ne voulut de ma compagnie, je fus relégué en bout de table à trois chaises de mes amis et seul, un serveur particulièrement enrhumé accepta de prendre ma commande. Vive le body combat |