Chronique du body combat
40 ! Le repas
-Ce soir mes enfants me
préparent un repas "Top chefs !». -C'est quoi ça "Top
chefs ? » Demanda Manu qui était
à
nos côtés. -C'est de la cuisine gastronomique,
il y a une émission
télévisée sur ce sujet chaque semaine. Celle de Meskerem. Elle est assise sur le sol, au beau
milieu de sa cuisine, devant
une petite marmite qui bouillonne sous un feu aux braises rouges. -Cémoikivègagnéconcourèbatregansiflè !
Murmura-t-elle dans
son dialecte bien compliqué. Elle avait une recette dans sa
tête, la recette ultime, celle
qui, dans sa tribu "Gouloum Gouloum" provoquait une
véritable
frénésie extasiée. De la langue de Congolais cuite
dans de l'urine de Sénégalais,
le tout mélangés avec une mixture de son ultime
secret. Elle se souvint avec
émotion de son enfance où ses trente
frères
et sœurs assis en cercles dégustaient ce met
délicieux, la bouche rougit par
les verres de sang qui accompagnait le festin. Puis elle sourit en songeant
à leur cuisinière, une grosse dame
pas très rapide qui avait déposé le
plat devant eux mais qui ne s'étant pas
enfuie assez vite s'était fait entamer, par les bouches trop
avides, une partie
de sa jambe gauche, ce qui avait déclenché les
rires de toute sa tribu... Elle écartela ses
narines pour en absorber la totalité de ces
délices... Sur le mur une ligne de placard
où reposait ses stocks de
victuailles. Il est bien
décidé à gagner ce concours du
meilleur cuisinier. Il ouvre le premier meuble pour y
découvrir une série de grandes
boîtes rondes à la couleur jaune
marquées créatine à la fraise, le
deuxième
placard c'est de la créatine au thon, ensuite de la
créatine à la viande, aux
légumes, aux fruits... Sa préférence
se porte sur le plus grand contenant, celui qu'il
chéri plus particulièrement. De la
créatine aux artichauts. Dans son grand mixeur, il
mélange une bonne vingtaine de jaunes
d'œufs puis, dans une grande casserole en cuivre, il verse le
tout avec
délectation. Tout en marmonnant leurs noms
savants, il y ajoute ses petits
secrets. "Carryofillion, saliva,
petrosilium, triphullon" puis
enfourne le tout. Et voilà une
virtuosité culinaire qui ne pourra faire que des
émules. Il se dirige, alors vers la barre
d'acier accrochée au plafond
et commence une série de traction avec ses bras, les jambes
cassées en angle
droit. Il sait qu'à son cinq centième mouvement
la cuisson sera terminée.
Elle regarda avec plaisir et hargne
le poisson qui mijotait dans
sa poêle, un Fugu, qu'elle avait
découpé elle-même en s'assurant de bien
entamé
la poche mortelle qui avait répandu son venin sur toute la
chaire de l'animal. Le fumet
dégagé était étrangement
délicieux, suave, avec une
touche de senteur de garrigue. Grillé à la
perfection, elle le déposa dans un grand plat,
l'entoura de tofu, puis prépara une succession de petits
bols qu'elle remplit
de sauce aux couleurs délicieuses. Son travail terminé,
elle fut secouée d'un petit rire âcre, ses
cheveux hérissés, elle imagina sa rivale qui
après s’être tordue de douleurs,
sombrerait inévitablement dans l'ultime voyage. Alors sa fille, qui pour lui est un
véritable mentor des arts de
la cuisson est à ses côtés pour guider
chacun de ses mouvements, chacune de ses
décisions pour concevoir la tarte de sa vie : -Papa, tu vois ça c'est
des œufs, mais on ne mange pas la
coquille, ce qui est bon est à l'intérieur, alors
tu les casses pour trouver le
blanc et le jaune. Alors, Manu acquiesçant
de la tête, en dépose cinq exemplaires
blanchâtres sur la table de cuisine, puis il se met
à compter de sa grosse
voix, "un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit," et lance son
poing volontaire sur son but avéré les faisant
éclater et projetant ainsi des
éclaboussures jusqu'au plafond. -Mais non papa, pas comme
ça ! Hurla la petite le visage maculé
d'albumine poisseuse. Et bien dis donc, je pense que ça va
être plus ardu que
je le pensais ! Après un nettoyage
difficile, tous les victuailles nécessaires sont
déposées de nouveau sur le plan de
travail : Paquet de farine, levure, fruits
délicats, crème fraîche. -Papa, maintenant tu fais
attention, tu manipules chaque chose
avec délicatesse et tu écoutes mes explications
avec vigilance avant de faire
des bêtises. Le visage confus, conscient de
l’ânerie qu'il venait de
commettre, Manu acquiesce à ce conseil parfaitement
justifié. Il commence à manipuler
le sac de farine avec soin quand la
petite fit la bévue inacceptable. -Tiens papa, prend un œuf
! Alors Manu commença
à avoir du mal à respirer, ses gestes
devinrent incontrôlés, la petite s'enfuit et
rapidement un nuage de poudre
blanche se rependit dans la pièce, les fruits rouges
éclaboussèrent les murs et
les hurlements de Manu "huit, huit, huit...", retentirent dans tout
le quartier.
-Ya Ko Line ma bien
aimée cousine, que le soleil au zénith te
bénisse de ses rayons ardents qui brûle dans un
ciel à la parfaite clarté ! -Cousin Chong, soit
vénéré par le souffle heureux de nos
ancêtres qui te protège de leurs puissances
ancestrales tout en te guidant vers
la sagesse ! -Mais honorable cousin, quelle est
cette odeur infecte qui se
dégage de ton estimable surprise. Ils eurent ensemble un
écart de tête pour éviter l'asphyxie. -Très chère
cousine, j'ai importé un conteneur de victuaille en
provenance de notre beau pays, malheureusement ils ont pris un peu le
chaud car
le congélateur est tombé en panne. Mais il faut
absolument que je me débarrasse
de tout le chargement. Et puis, tu le sais bien, ses
mécréants sont tellement
bêtes que quand cette nourriture sera
mélangée à un peu de sauce de soja,
ils
ne s'apercevront de rien. J'ai d'ailleurs liquidé
une bonne partie de la cargaison, avec
succès dans les restaurants de Genève. Des menottes étaient
accrochées aux murs, des masques de
bourreau, des fouets, des pinces aux allures bizarres posées
sur les étagères. Qu'allait-elle préparer ? Elle sortit d'un grand sac de
commissions ses nourritures
préférées. Elle avait
expérimenté cette recette lors d'une de ses
soirées
coquines avec une quinzaine de ses amis
préférés et l'effet
escompté avait été,
à son goût, tout à fait assouvissant. Alors elle eut cette excellente
idée. Elle fourra la pâte dans
des cornets façon tapas et les aligna
de manière convaincante dans une longue assiette. Pourtant elle devait faire bonne
figure devant notre groupe,
éviter le plat trop criant d'un met de super
marché ou la tricherie provenant
d'un traiteur. Armée de son esprit
volontaire, elle ouvrit son frigo. Il était propre ! Même très
propre ! Mais, bon un peu vide, beaucoup
trop vide. Soudain elle aperçut
dans le casier du bas un pot de couleur
rougeâtre. C'était une boîte de
concentré de tomates. C'est alors que germa en
elle une idée superbe : -je vais préparer des
spaghettis à la bolognaise, c'est vraiment
un plat succulent et tellement original ! Les spaghettis, elle en avait
toujours un paquet en stock. La viande ? En moins de temps qu'il m'en faut
pour l'écrire le plat fut
préparé avec comme seuls
mécontentements, les miaulements du matou furieux de
voir s'envoler sa pitance du jour. Son grand sourire, sa
jovialité, sa bonne humeur, il le savait,
lui permettaient quelques petites tricheries évidentes qui
même si elles
étaient soupçonnées passeraient
facilement comme des vérités incontestables. Aujourd’hui, il avait
invité la comtesse Gurgen de Akenboler,
l'une des personnalités Genevoise qu'il connaissait
particulièrement bien : -Mon très,
très cher ! Dit-elle. Quelle joie de venir passer
cette douce après-midi en votre compagnie. -C'est un plaisir
partagé. Répondit-il après l'avoir
gratifiée
d'un baise main respectueux. La belle dame posa son ample
chapeau garni de fleurs de
printemps sur une chaise, se retourna et appela : -Alors Nestor. Que faites-vous mon
brave ! Un grand homme, à fier
allure avança avec timidité. Il tenait
pendu à sa main gauche une grande valise contenant ses
trésors. La comtesse continua en s'adressant
à Barham : Barham, tout en la remerciant de sa
gentillesse emmena le maître
queux dans son immense cuisine où les nourritures
indispensables à la
confection d'un plat digne de ce nom étaient
réunis. Homards, caviar, langoustines,
mangues et fruits exotiques
rares, champagnes et vins fins. -Voilà mon brave, faites
votre ouvrage ! Dit Barham en
empruntant le ton de circonstance indispensable devant son illustre
invitée. L'homme mit son tablier d'un blanc
immaculé, se couvrit de son
long chapeau et s'affaira immédiatement à la
confection de son chef d'œuvre
culinaire. Pendant ce temps la comtesse et
notre ami Barham allèrent sous
la loggia pour se rassasier de petites gâteries et
déguster, le petit doigt en
l'air, un thé au jasmin en provenance du Sri Lanka. Trois heures plus tard le plat de
roi leur fut présenté. Un genou à terre Nestor,
la tête baissée présenta son met de
gala, arrangé de la plus belle façon, sur un
immense plat en argent aux liserés
recouverts à
la feuille d'or. Un immense sourire
découvrit la dentition parfaite de Barham. Il le savait maintenant, il
gagnerait avec certitude le
concours. Tout en tapotant sa plus belle
batterie qui se trouvait posée à
côté de lui sur un coussin recouvert de soie du
Japon, il remercia mille fois
la Comtesse qui semblait particulièrement émue
à la vue des délices que son
chef avait si parfaitement préparé. En tant que narrateur de cette
passionnante histoire, mon temps
étant compté, j'avais
préparé un gratin Dauphinois,
confectionné à la hâte et
qui serait servi dans son plat Pyrex que j’utilisais pour la
cuisson. -----------------------------
Après le cours se fut
direction immédiate vers le lieu de notre
compétition culinaire. -Pauvre Anne, lui dis-je d'un ton
compatissant, tu t'étais donné
tant de mal ! -Ce n'est pas grave me
répondit-elle, en ricanant, j'en ai servi
une magnifique portion à notre juge, c'est ça qui
compte ! Puis elle ramassa
les restes de poissons qui jonchaient le sol et les expédia
par la fenêtre Donc, la répartition fut
la suivante : Barham, celui de Ya Ko Line. Mousse récolta mon
gratin. Ya Ko Line le festin de Bahram. Meskerem le gâteau de
Manu. Mademoiselle Linette le
délice confectionné par Stan. Anne celui de Mousse. Stan fut obligée de
s'engager, avec une large grimace, sur celui
de Meskerem. Pas un mot ne retentit lors des
premières bouchées. Il régnait un mutisme
monastique, avec comme seul bruit de fond
le tintement des fourchettes qui heurtent les assiettes et la
mastication
appliquée de chaque convive. -Moi j'aime bien les
gâteaux au chocolat. Suivi de la réponse
vexée de Manu : -C'n’est pas du
chocolat ! Mon gâteau, il est juste un peu
brûlé
!
Puis elle se mit à
enchaîner une centaine de pompes, marcha sur
les mains et se cogna la tête sur un mur à la
manière d’un métronome.
C’est alors que je fus
heureux de ma perspicacité.
Alors, je me mis à
crier : -Manu vite, cours dehors, va au
fond du jardin. Il réussit à
se frayer un chemin entre les multiples cadavres
d’animaux qui avaient eu la malencontreuse idée de
goûter au dîner qu’Anne
avait jeté dans la cours. Et ! Soudain ! Vive le body combat
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