Le sac de jute
Manu grommela de plaisir. Il
venait de terminer la couture
qui devait fermer hermétiquement le sac. Puis,
armé d’une paire de ciseau, il
fit sur chaque côté, deux trous suffisamment
grands pour pouvoir y passer ses
deux bras.
Il sourit.
Il était prêt.
Ce soir, se serait le grand soir, il en rêvait depuis
plusieurs jours…
Quelques jours plus
tôt…
On était mardi soir,
et c’était en comité restreint que nous
étions allés boire un verre à la
Gioconda.
Il y avait Stan, Mademoiselle Linette, Manu et moi-même.
Mademoiselle Linette !
Je ne vous l’ai encore jamais
présentée. C’est une jolie jeune femme,
plantureuse, qui dit elle-même avoir
été élevée au bon lait de
vache et aux bols
de maïs.
Elle a la particularité d’être
extrêmement volubile, et peut décrire toutes
anecdotes de sa vie comme étant une aventure extraordinaire
où le moindre
détail est pointé, puis accompagné par
une gestuelle particulièrement imagée.
Alors, nous l’écoutions, nous amusant de ses
histoires, quand, soudain, je ne
me souviens plus pour quelle raison, elle se mit à parler de
sexe !
Elle se tourna vers moi en me demandant :
-Pierre, ça ne te choque pas si j’aborde ce
sujet ?
Après une moue d’étonnement, je
répondis dans la négative.
Stan, intéressée, arrêta
instantanément son repoudrage de nez.
Manu écarquilla les yeux et se pencha un peu plus dans sa
direction par peur de
manquer des propos intéressants.
Alors elle commença.
-La dernière fois que j’ai
fréquenté un club échangiste,
j’ai joué au jeu du
sac de jute !
-Du sac de jute ! S’étonna Manu.
-Oui, du sac de jute ! Elle continua.
J’étais complètement nue, on
m’a
recouverte jusqu’à la taille d’un sac
complètement opaque où deux trous
percés sur
les côtés me permettaient le passage de mes bras.
Le but du jeu était pour moi, de faire le tour de la salle
en essayant d’empoigner
la partie la plus rigide des protagonistes.
A chaque résultat positif, le gage de l’individu
était de m’honorer de la
meilleure des façons.
Et bien !
Durant cette soirée, j’ai fait mouche vingt
fois ! Ajoute-t-elle
fièrement.
-Quoi ! Hurla Manu.
Il se mit soudainement à baver, ses mains
empoignèrent le bas de la table qu’il
secoua, une moiteur visqueuse inonda son visage et, en dessous de sa
ceinture,
sa combinaison de skieur de fond eut beaucoup de mal à
contenir sa virilité.
Stan, barra d’un long
trait de rouge à lèvre son visage
éberlué.
Et, je me mis soudainement
à penser que cette Linette
pouvait devenir une amie d’un intérêt
certain…
On était mardi soir.
Le groupe était au complet, attendant avec impatience le
cours de body combat.
Quand.
Soudain.
Manu arriva, en boitant, le front tuméfié de
bleues, en se tenant les reins
d’une main et en se frottant vigoureusement
l’entrejambe de l’autre.
Nous nous inquiétâmes de son état.
Alors, il nous répondit.
-Hier soir, on a couché les filles plus tôt
qu’à l’habitude et j’ai voulu
essayé sur moi ce fameux sac de jute. Malheureusement ma
femme, pendant que je
déambulai à l’aveugle dans la
pièce, s’est absentée quelques instants
en
oubliant de fermer la porte du balcon !
Vive le body combat