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La jolie dame.

J’ai hésité longuement avant d’écrire cette histoire qui m’est arrivée il y a moins d’un mois.
Vous allez penser que je suis un menteur.
Ah Pierre, toi et tes histoires loufoques, tu ne sais vraiment plus quoi inventer !
Pourtant…
Pourtant…
Commençons par le commencement.
J’avais retrouvé par des travers improbables, une personne que je fréquentais il y a une quinzaine d’année de ça et que j’avais perdue de vue pour je ne sais quelles raisons.
Je l’avais appelée « La jolie dame ». Non seulement parce qu’elle avait une apparence très agréable, mais également j’aimais son côté attentif, intuitif, intelligent.

Alors, quinze ans plus tard, alors qu’elle s’était peu à peu complètement effacée de ma mémoire, une succession de hasards improbables m’avaient rappelé son souvenir.
Et nous nous étions retrouvés dans ce restaurant un peu commun, sans attrait particulier.
Que d’émotions remontaient de ces souvenirs perdus.
Je pense que nous ressentions, toujours la même attirance, la même complicité, le même plaisir d’être ensemble. La même envie de se regarder, de jauger nos émotions, d’accepter cet oubli incompréhensible.
En fait nous n’avions pas beaucoup changés, nos vies avaient continué leurs péripéties, s’étaient fourvoyées dans les mêmes erreurs sans accomplir ces changements qui n’auraient pu être que salutaires.
Je l’écoutais rebondissant sur des idées communes, écoutant avec attention son désir de réussir dans sa nouvelle orientation professionnelle, de rompre avec cette vie d’apostolat avec un homme difficile.
Puis elle s’intéressait à ma vie, semblait vraiment assimiler mes propos.
Enfin.
Tout concordait entre nous, la communion me semblait parfaite, idéale…
Eh bien, malheureusement il y avait un terrible « Hic » dans son comportement.
Je ne m’en étais pas rendu compte tout de suite.
Et puis, petit à petit, j’avais trouvé cela…
Gênant.
Etrange.
Anormal…
Vous connaissez mon esprit inquisiteur, qui fouine dans vos réactions, vos paroles, vos gestes, pour comprendre vos forces et vos faiblesses, qui m’incite à conclure, à me gargariser de vos personnalités en exagérant la moindre de vos originalités.

Et bien, alors que toujours, ces analyses ne sont que l’aboutissant de mes bêtises sans importances.
Pour elle j’ai trouvé que son comportement était grave. Très grave !
A mon avis, elle n’avait pas d’amis, ne s’intéressait pas aux choses d’importances, devait avoir une vie triste, un tempérament acariâtre.

Imaginez !
Je vous vois déjà frémir de peur !
Elle venait de passer l’intégralité de notre repas en tête à tête sans sortir son téléphone de son sac.
J’avais même imaginé un instant, comble de l’horreur, qu’elle n’en possédait pas un.

Pourtant, quelques instants avant de nous séparer elle en sortit un de sa poche et l’alluma, question de voir l’heure et de vérifier qu’elle n’était pas en retard pour son rendez-vous.
Son téléphone se mit à tinter, crépiter de multiples façons, elle eut une moue d’ennuie et le remis dans son logement initial sans même y jeter un coup d’œil.
Rendez-vous compte !
Ça ne m’était pas arrivé depuis des années.
Assurément, chacune de mes sorties familiales, entre amis où même en tête à tête étaient dominées par le Dieu téléphone.
Où chacun s’intéressait avec peu d’attention à la conversation de table, pour se plonger, avec une répétition maladive, à toutes leurs notifications incontournables. En tapotant une réponse rapide, en daignant une appréciation « facebook ou whatsapp » avec un soulagement magique et même certaines fois, en répondant à un appel vocal, me laissant comme un idiot devant ma conversation que je croyais intéressante.
Et je m’y étais fait.
Je trouvais ça complètement normal, vital peut-être.
Il fallait absolument continuer à regarder pour la 200ième fois de la journée, l’objet de notre unique désir, en ne sachant même plus vraiment à qui l’on parlait ou à quoi l’on répondait…
Alors vous devez déjà vous douter de ma conclusion concernant cette jolie dame et de sa déplorable attitude, je dirai même son anormalité.

Pour sûre, Je ne suis pas près de la revoir !