Le prêt

 Heureux, oui j'étais heureux!
 La bonne nouvelle était arrivée tel un rayon de soleil, m'enivrant de ce rêve qui jusqu'alors m'avait paru impossible.
 Par ce magnifique don du ciel j'allais pouvoir m'acheter la maison de mes rêves et me repaitre dans le dédale de mes phantasmes.
 Ce matin, marchant d'un pas heureux, je me dirigeais vers ma banque pour obtenir ce prêt qui compléterait mon achat.
 La porte du bureau du directeur de l'agence était grande ouverte et je pénétrais dans son antre d'un pas décidé pour régler l'évidence de son acceptation.
 Après quelques amabilités, il me demanda :
 -Alors Monsieur Abdul, que me vaut l'honneur de votre visite.
 Je me délectais de ce mot honneur.
 Il devait être au courant...
-Et bien, que le prophète me protège, lui dis-je sûre de moi, j'y ai besoin d'un prêt pour m'acheter une Riad.
 Il me regarda d'un air affable et consentant.
 Je jubilais déjà.
 -Combien vous faut-il, continua t'il.
 -Six millions d'euros mon frère, lui demandais-je d'un ton triomphateur.
 Il écarquilla grand ses yeux, pianota rapidement sur son ordinateur pour arriver à mon compte en banque.
 Une somme à quatre chiffres ornait mon livret d'épargne.
 -T'y vois, j’y suis solvable! Lui affirmais-je le sourire aux lèvres.
-Et, vous avez un chèque pour étoffer ce maigre montant.
 -Non, quel besoin, Thomas Fabius, t'y sais le fils du ministre, et bien, lui, il n'paie pas d'impôt, c'est d'ailleurs certainement un Rmiste, et z’y va, sa banque lui a donné un prêt de 6 millions sans l'y ptit problème.
 C'est alors qu'il se fâcha.
-Et vous croyez ça drôle, hurla-t-il, que j'n'ai que ça à faire! Puis une succession de propos peu élogieux et de noms d'oiseaux à mon encontre m'ordonnèrent de partir en vitesse.

 Triste, le cœur brisé, il m'a fallu quelques jours pour comprendre la raison de son implacable refus.

 Les banquiers sont tous des racistes !