Un mail sympathique d'un lecteur assidu     

Cher Monsieur Viagex 

Nous étions tranquillement assis à table ma petite famille et moi-même. La conversation était réduite à sa plus simple expression. Voulant animer cette ambiance à mon goût trop placide, j'articulais quelques propos :

« Parait, qu'y'a les soldes à Genève!

Soudain les yeux de ma mie s'enflammèrent.

Mes enfants me regardèrent effarés et mon fils me confia :

-T'aurais mieux fait de te taire ! »

Effectivement un quart d'heure plus tard, pied au plancher, ma douce moitié m'invectivait d'augmenter l'allure de notre véhicule pour rejoindre au plus vite la belle cité de Calvin.

Enfin arrivés devant l'entrée du Grand magasin "Globus", ma tendre et gracieuse compagne, armée de son redoutable rouleau à pâtisserie se fraya immédiatement un chemin parmi la gente féminine hystérique. Reculant prestement d'un pas, je ne me sentis soudainement pas le courage de la suivre et préférai intégrer la quiétude de la librairie Payot. Je parcourus tranquillement l'endroit cherchant quelques lectures pour agrémenter la semaine à venir. Quand, tout à coup, mon esprit encore perdu dans un confort soporifique activa ses neurones. Le titre d'un ouvrage "Comment devenir riche" me sembla d'une utilité cruciale. Ne comprenant pas vraiment cette inclination soudaine, ma main empoigna l'ouvrage et ma curiosité congénitale me susurra que la soirée devait être passée en sa compagnie...

Je retrouvai ma femme, un peu plus tard, les cheveux en bataille et la mine réjouie. Elle me montra ses mains encombrées de paquets et me dit :

« Voilà l'travail ! »

Je compris enfin le mobile de l'impératif besoin qui s'était emparé de moi auparavant et je me mis à songer aux longues heures supplémentaires que ses emplettes m'obligeraient bientôt à accomplir. 

Sur le chemin du retour la frimousse épanouie de ma douce aimée contrastait fortement avec mon expression déconfite. D'une voix fluette elle me détailla chaque homérique découverte qui lui avait permis ces fructueux achats. 

Pour moi la seule morale indubitable que cette triste histoire inflige à mon inepte personne et de bannir à jamais le mot solde de mon vocabulaire.

Bonne continuation

Pierre

 

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