Voici une lettre sympa d'un lecteur assidu de Viagex me faisant part d'une de ses aventures.

Gex le 02/09/2000

J'ai eu la honte de ma vie. Voici les faits tels qu'ils se sont passés.

Je me retrouvais ce petit matin de septembre, seul, tremblant de honte, dans la petite librairie de Gex. Un de mes amis, écrivain de grand talent, m'avait le jour précédent indiqué qu'un article élogieux à son sujet venait d'être publié dans la presse nationale. Jusque là tout semblerait normal, mais quelle ne fut pas ma surprise empreinte d'indignation, quand il me révéla le titre du magazine où avait paru le texte qui vantait ses ouvrages.

Je tendais donc, tant bien que mal cette revue au libraire qui, me toisant d'un regard empli de dégoût m'envoya d'un ton sec.

-Quinze Francs!

Une petite grand-mère qui se tenait à côté de moi chuchota quelques mots à l'oreille de sa voisine.

-Y'en a qui manquent pas de toupet! Vraiment écœurant!!!

Je ne demandais pas mon reste et l'objet de mon délit à la main je me précipitais ventre à terre dans la petite rue discrète qui m'emmenait directement à mon logis. Je cachais le périodique dans un recoin de mon ample imperméable noir, enfonçais mon grand chapeau de toile jusqu'aux oreilles et n'espérais qu'une seule chose, ne pas être reconnu...

Quelques cheminots, le béret accroché au sommet de leur tête m'envoyèrent quelques regards que j'oserais qualifier de "Prolétaire", deux femmes de mauvaise-vie qui traînaient encore, abritées par la pénombre qui régnait en cette heure matinale, m'invectivèrent de leurs sarcasmes.

-Alors mon gars, pour t'amuser, faudrait mieux qu'tu viennes nous voir!

Enfin j'arrivais à mon appartement, épuisé et couvert d'une transpiration que l'angoisse m'avait dispensée.

Sans un bruit, de peur d'éveiller ma compagne, je me dirigeais dans ce petit local qui me servait de bureau. Même enfermé à double tours, je ne me sentais pas totalement en sécurité. Une lampe de poche à la main je rejoignais le coin le plus sombre de la pièce.

Autour de moi, les nombreuses photos de Lénine, Fidel Castro et Mao Tse Tung semblaient me regarder avec réprobation. Je m'astreignais donc à retourner tous les portraits de ces grands hommes. Quelque peu soulagé mais toujours frissonnant de scrupules, je regardais la couverture de ce  journal abominable. Moi communiste convaincu, qui toute ma vie avait chanté l'Internationale, le poing levé, défilant contre ce patronat qui exploitait l'ensemble de la classe laborieuse. Amer que j'étais d'avoir vu la chute du mur de Berlin et la soumission aux lois capitalistes du pays de mes rêves. Moi qui n'avais jamais accepté que nos employeurs sans  scrupules, abusent sans vergogne de la sueur de leurs ouvriers. Et bien moi! Je tenais maintenant dans ma main un numéro de CAPITAL!!!

Après avoir lu et découpé l'article qui m'intéressait. Je fis rejoindre ce livre de la honte, au bûcher, que j'allumais promptement dans ma cheminée malgré la forte chaleur environnante.

-A mort! Sorcier du mal! m'écriais-je, en voyant s'envoler en fumée l'objet de ma souffrance...

Merci cher monsieur Viagex pour votre écoute.

Votre dévoué camarade.

Emile ...

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