Auriez-vous pu croire un instant, que notre groupe lié
par une amitié indéfectible puisse un jour se fâcher ?
Eh bien oui...
Voici le récit de cette triste histoire.
Tout commença dans le parking sous terrain de l'ICC.
Une vision furtive, une odeur lascive, un froissement de tissu, une blondeur
ondulante. La beauté chez une femme est très souvent subjective, plaisant à
certain, déplaisant à d'autres. Pourtant, cette créature de rêve que je venais
d'apercevoir, ne pouvait qu'engager l'unanimité. Nous prîmes l'ascenseur
ensemble. Je fus subjugué par sa perfection. Grace infinie, excellence de ses
formes, teint pastel. Ses yeux croisèrent les miens un instant...
Je crus défaillir.
Je la suivais jusqu'à la salle de sport qu'elle semblait comme moi également fréquenter.
Sa démarche gracieuse, sa grâce évidente, éveillait en moi un désir
concupiscent. Elle entra dans mon club et sa voix de miel lança
au préposé, un petit bonjour sympathique. Il lui rendit sa politesse en
ajoutant son prénom, « Isabelle. »
Mon cœur battait la chamade, Isabelle !
Je ne vis que pour toi, Isabelle !
Belle Isabelle !
Belle !
Cette syllabe lui allait si bien.
Je rejoignis tout ému mon groupe de body combat, la gorge sèche, le front
mouillé d'une sueur d'envie et le cours commença. L'échauffement à peine
entamé. Elle poussa la porte d'une main légère et se planta au beau milieu de
notre salle. Quand je vous dis, elle, vous l'aurez bien compris, je parle
d'Isabelle, de la splendide Isabelle, de la séduisante Isabelle, de la sublime
Isabelle.
Venu fut le premier à réagir en restant scotché dans une position d'étirement
difficile.
Dominique émit un petit cri presque mélodieux.
Chantal haussa des épaules pensant qu'une femme n'était nullement un objet de
convoitise.
Catherine rougit.
Olga jalouse de cette concurrente fit mine de ne pas l'avoir remarquée.
Meriem sembla intéressée, en se disant que dans le cas de cette beauté, la
burka aurait été synonyme de péché.
Aurélie se dit qu'elle n'aurait jamais été enceinte si elle avait été en
concurrence avec une telle personne.
Seul Rolph resta indifférent à sa présence, occupé qu'il était à lorgner sur
son poignet gauche.
Rapidement une foule de la gente masculine s'agglutina, le nez rivé
contre la baie vitrée pour lorgner dans notre salle. On ne pouvait pas
distinguer clairement le visage de ces individus qui étaient cachés par la buée
épaisse que leur moiteur de convoitise dégageait.
Pourtant, Chantal reconnaissant Phil, seul homme, parmi ces pervers, à tenir un
nem dans sa main, émit un hurlement de rage :
« Phil, qu'est-ce que tu fais ici ! »
Puis elle se rua vers la porte avec la ferme intention de rosser son ami
dépravé. Celui-ci détala sans demander son reste.
A la fin du cours l'atmosphère restait tendue. La belle étant partit. Olga se
dirigea vers Venu, affreusement contrariée qu'elle était par l'inattention de
notre séducteur. Elle lui dit que s'il avait demandé, elle lui aurait dit
que son arrière petite cousine était une Polonaise.
Aurélie se tourna vers Meriem et sur un ton de jalousie, affirma qu'elle ne
trouvait pas que cette fille avait quoi que ce soit de spécial. Meriem que la
beauté d'Isabelle n'avait pas laissé indifférente, offusquée par cette remarque
qu'elle trouvait désobligeante, lui répondit qu'au moins elle, n'était pas une
poufiasse !
Aurélie furieuse lui répondit par des adjectifs tels que :
Bedonnante, adipeuse, boursouflée, patapouf.
Un crêpage de chignon s'en suivit.
Catherine n'appréciant pas du tout ces attitudes délétères, jura son dégout :
« C'est pas bien ! »
Dominique voulant calmer nos esprits échauffés se mit à chanter l'une de ses
ritournelles.
Tout le monde se tourna vers lui et cria :
« Ta gueule ! »
Je dois vous dire que je rejoignis tout de go cette invective avec un
contentement évident.
Seul Rolph restait sans réaction, les yeux toujours rivés sur son poignet
gauche. Il venait de s'y faire tatouer le portrait de Nadia.
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