Qui
veut une pilule
Anne-Marie était arrivée un peu en avance ce
soir-là. La tête entourée
d’un bandeau blanc.
Elle avait essayé la danse du pivert durant le week-end et
en gardait encore toutes les séquelles.
Chantal était assise sur une chaise, la tête entre
mains.
-Y’a quelque chose qui ne va pas Chantal, t’es
aussi allée danser ? Lui demanda-t-elle.
-P… de M… je ne me sens pas en forme. Pourtant
j’ai eu un festin de reine ce midi. Trente petits pois, une
feuille de laitue et un demi-crouton de pain.
C’est alors qu’Anne-Marie sortit de sa poche un
petit flacon où gigotaient quelques dizaines de petites
pilules blanches.
-Tiens, prends-en une tu verras, avec ça tu vas
péter le feu !
Et c’est ce qui se passa, notre chère Chantal se
déchaina pendant
l’intégralité de notre cours de body
combat, suscitant l’admiration de tous.
Une semaine passa sur cet exploit magique.
Anne-Marie qui avait continué l’apprentissage de
sa nouvelle danse, avait de plus en plus mal au crâne et, au
moment de partir pour nous rejoindre à notre club, elle se
trompa de flacon pour prendre celui qui contenait des
somnifères.
On était tous là, animés par la
même idée. Essayer l’une de ces petites
pilules miracles. On jouait donc la comédie,
aligné en rang d’ognon, assis sur le sol et le dos
au mur. En voyant arriver Anne-Marie, nous nous mîmes tous
à gémir :
« Je suis fatigué !» était
l’essence de notre litanie commune.
Et comme nous l’avions espéré, chacun
eut droit à ce petit cachet prodige à
l’exception, toute fois, de Venu qui refusa l’offre
en argumentant que depuis qu’il vivait avec la vieille Indira
Kalinranjan, sa force de mâle en rut restait intacte et
inassouvie et qu’il avait de l’énergie
à revendre.
Le cours commença animé en « team-
teach » par Dominique et Gaby.
Rapidement, nous fûmes tous pris de cet envi de dormir.
Chacun s’effondra sur le sol et mon dernier souvenir avant de
feindre fut les ronflements gargantuesques d’Olga.
Je ne sais pas combien de temps dura mon inconscience.
Quand enfin je me réveillais, nous étions tous
dans le noir.
On s’étirait en baillant.
Puis ce fut l’étonnement
général. Les filles étaient toutes
habillées d’une façon
différente. Catherine portait la Burka de Meriem, Meriem le
short de Martine, Martine le T-shirt de Miliar. Olga l’une
des chaussettes de Gaby et Gaby le bandeau
d’Aurélie. Puis il y avait ce petit blondinet qui
se frottait les fesses de douleur et cette petite Polonaise qui se
nettoyait la bouche pour enlever ce que je crus être un filet
de salive.
C’est en entrant dans les vestiaires que j’entrevis
la clef de ce mystère.
Venu sortit de la douche, l’air détendu, calme,
serein et contrairement à l’habitude sa
virilité apparaissait dans le plus profond repos…