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Promenade en raquettes à la Vattay
Purée !!!
J’en ai marre de ces théories complotistes.
Paraît-il, que l’on est surveillé tout le temps, qu’on nous manipule grâce aux informations que l’on récolte sur les réseaux sociaux.
Facebook, Instagram, Tik tok et même maintenant whatsapp !!! Notre réseau de « chatting » préféré est montré du doigt.
ON NOUS MANIPULE, NOUS SOMMES TOUS DEVENUS DES MOUTONS DE PANURGE.
Panurge ?
« Héhé quelqu’un connait Rabelais ! Ben maintenant si.
Hi iz a fraine che hauteur ! Comme dirait ze Bahram. »
Moi je n’y crois pas…
On n’est pas surveillé du tout, du tout.
Rien de ma vie ne transparait à travers les réseaux sociaux. JE SUIS INVISIBLE ! A part peut-être ma qualité de meilleur body combattant au monde, mais bon ce n’est qu’une évidence…
Pourtant, pourtant.
Il y eut ce jour de promenade en raquettes qui changea mon opinion en me faisant comprendre que même whatsapp était fliqué !
Tout cela, par la faute ou par la chance de ce simple petit message :
« Stéphane, si tu es libre, on se fait une promenade à la Vattay, demain après-midi ! ».
Puis il y eut sa cinglante réponse :
« OK »
Ce message semble anodin, et bien ce « Ok » venant de Stéphane, changea le cours de ma pensée de vieil homme têtu, borné et un peu acariâtre, car il fut la preuve irréfutable de ce complotisme sous-jacent.
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On était mardi après-midi.
Pas de body combat cette fois ci, mais une promenade en raquettes à la Vattay.
Ceci sous un soleil radieux et dans un paysage digne de conte de fées où une neige abondante récemment tombée avait répandu son merveilleux manteau blanc. Les sapins courbaient leurs rameaux du poids de leurs fardeaux blancs, les grands Tétras claquetaient leur joie de la montagne inondée de liberté.
J’étais en compagnie de Stéphane plus communément appelé le Canoc et de Raphaël !
Vous allez me demander, mais qui est Raphaël ?
D’abord par mesure de simplicité appelons le Rafi.
Et bien Rafi est ma nouvelle rencontre, mon nouvel ami de la période Covid.
Coupé du monde comme je l’étais, j’avais pris l’habitude de fréquenter avec assiduité tous les enterrements de la région, profitant de ses tristes évènements pour enfin adresser la parole à un être humain, un être fait de chair et d’os.
D’habitude je choisissais quelques jolies femmes, les blondinettes de préférences, celles aux décolletés avenants.
Mais cette fois ci j’avais choisi Rafi…
Je vous rassure, ce n’était pas par simple gout mais parce que la dame la plus jeune de l’assemblée devait bien avoir 85 ans.
De plus Rafi était dans la même déréliction que moi.
Une pauvre âme seule du Pays de Gex qui m’avait affirmé tout de go « Moi je n’ai pas d’amis !».
« Pas de problème mon gars ! Lui avais-je répondu, je t’emmène faire des raquettes demain.
Le grand air te fera du bien !
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Stéphane démarra notre promenade en trombe.
Sa bolée de Poutine mangée le matin même avait décuplé ses forces, réveillé sa jouvence, transcendé son apothéose divine.
Je le suivais tant bien que mal, suffoquant à chaque enjambée, tandis que notre pauvre petit Rafi qui avait cru en une ballade de santé qu’il aurait voulu socialisante, expirait quelques mots saccadés :
-Tu… viens… d’où… Stéphane, tu… habites… où ???
-Et… toi… Pierre… C’est… vrai… que… Tu… connais… un… Bon… Prof… d’Anglais ???
Le pauvre n’en pouvait plus et c’est avec plus de 30 minutes de retard qu’il nous rattrapa à la pause pique-nique, à côté ce chalet que nous lui avions montré deux heures auparavant, du lointain, à l’aide d’un simple trait de doigt.
Une petite chaumière brumeuse qu’il avait regardée avec effarement :
-Mais… C’est… Vachement… haut… et… loin…
Stéphane bonne pâte avait alors plongé la main dans son sac à dos pour lui sortir une vieille boite de Poutine qu’il avait oubliée en cet endroit, entamée, lors de la saison de skis précédente.
- Tiens, p’tit gars, chez nous autres on l’aime sentifère et vergouilleuse ! (Traduction : On l’aime quand elle sent fort et qu’il y a de la vermine.)
L’odeur était infâme certes, sa présentation particulière, mais voulant atteindre la forme physique de notre athlète, il l’avala les yeux fermés en se bouchant le nez.
Bien entendu, elle n’eut pas le résultat escompté et ne provoqua chez lui que des renvois tonitruants et des déglutitions nauséeuses…
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Ce chalet de montagne servait l’été de refuge aux troupeaux de vaches, avec une sorte d’étable et une partie habitation. Il était fermé à double tour mais son pourtour protégé des chutes de neige nous permettait un réconfort au sec.
Chacun sortit son piquenique et nos crocs plongèrent avec délectation dans ces délices bien mérités.
Stéphane à l’esprit scientifique nous fit une remarque concernant la position du croissant lunaire qui opposait son ombre laiteuse haut dans le ciel.
C’est alors que Rafi s’exclama :
-On n’est jamais allé sur la lune, c’est un complot des Américains, l’atterrissage, les premiers pas ! Tout a été filmé dans un studio d’Hollywood.
Je lançais un regard interrogatif à Stéphane qui me répondit par un petit sourire moqueur.
-Et puis ! Continua Rafi, personne ne peut traverser la ceinture radioactive qui entoure la Terre.
-Mais la ceinture de Van Allen a un taux de contamination minime, 2 millisieverts à sa pire apogée ! Ce n’est rien du tout…
Alors il se mit à trembler.
Rapidement il sortit un instrument bizarre de son sac à dos. Un serre-tête surmonter de deux antennes terminées par deux petites boules en acier doré et phosphorescent.
Il plaça le tout sur sa tête qu’il agita d’une façon désordonnée dans un tournoiement apocalyptique.
Les yeux de Rafi devinrent globuleux, une bave jaunâtre coula de sa bouche.
Puis soudain dans un cri ultime il retrouva sa composition. Enleva sa coiffe hétéroclite et nous regarda, apaisé :
-ça va les amis, j’ai eu peur un instant, mais ne craignez rien nous ne sommes actuellement pas observés par les extra-terrestres !
Devant nos bobines ébahies, il nous expliqua que la Terre était beaucoup plus grande que ce que l’on voulait bien nous faire croire et qu’au Pôle sud de grandes parties inexplorées hébergeaient des êtres qui dominaient le monde et nous guidaient tels des moutons avec l’aide de Bill Gates.
Je vous passerais sur toutes les théories complotistes auxquelles il nous convia pour m’arrêter sur cette histoire de « whatsapp » qui était à son avis, une immense supercherie qui nous fliquait à chaque seconde et dont il fallait vite se débarrasser pour retrouver notre liberté.
Alors là, je ne pus m’empêcher de rire :
-« Whatsapp » mais qu’est-ce que tu racontes, c’est juste un moyen de communiquer, pratique et tout à fait anodin !
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Le retour se fit sans encombre.
Stéphane frais comme un gardon nous reconduisit à Gex dans sa voiture, tandis que Rafi et moi-même totalement épuisés, nous piquions une petite sieste réparatrice.
Arrivé dans la cour de l’usine. Stéphane sortit de la voiture, prêt pour son petit plaisir.
Oui, un petit plaisir qui l’enchante !
Quelque chose qu’il adore faire à la fin de chacune de nos sorties :
-Pierre est ce que je peux aller faire pipi derrière ton usine ?
Oui, je dois vous expliquer, l’eau du bâtiment étant coupée les WC à l’intérieur ne sont plus utilisables :
-Bien sûre, lui répondis-je avec mon sourire malicieux et complice et n’aies aucune crainte le bâtiment ne m’appartient plus !
Alors tout frétillant, il disparut pendant cinq bonnes minutes pour revenir la mine épanouie et bienheureuse.
Après son départ je dus aller justement à l’arrière du bâtiment pour regarder mon jardin hivernal.
Et bien !
Il s’en était donné à cœur joie notre Stéphane.
Un trait d’urine parcourait le mur de l’édifice sur presque dix mètres, pour monter à certain endroit jusqu’à deux mètres cinquante de hauteur !
« Purée, il n’y est pas allé de « main morte » cette fois ci ». Me mis-je à penser.
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Ce sont les jours qui suivirent cette merveilleuse promenade que mon opinion sur Whatsapp changea radicalement.
Car, depuis ce fameux message « OK » de Stéphane.
Maintenant, sur tous mes réseaux sociaux je reçois…
De la publicité pour de la poutine !!!
Vive les raquettes