L'instit était poète La
nouvelle se propagea comme une traînée de poudre. Monsieur François
Puremon, un instituteur bien
connu à Gex venait de se suicider. Incroyable, la consternation animait
l'ensemble de ses collègues. Pourquoi avait-il fait cela ? Il
semblait si paisible, comblé, bien intégré dans son travail, aimé de
tous ses élèves. Père
de deux enfants, il était marié à Louison qu'il connaissait depuis sa
plus tendre enfance. Ils avaient tous deux suivis un chemin tendrement
partagé. Une petite maison aux volets rouges faisait leur bonheur. Leurs
enfants resplendissants
rayonnaient la joie de vivre. Alors,
que s'était-il donc bien passé ? « Il
n'a pas supporté d'être un écrivain raté ! C'est ainsi que Madame
Gemino s'exprima à la sortie de l'église. C'est
une vraie langue de vipère pensa l'inspecteur Puppa qui se tenait non
loin d'elle. Elle
continua. -
Vous savez, il avait écrit un recueil de poèmes, il paraît qu'il n'en a
vendu que quarante, on raconte également que c'est sa femme qui les a
tous achetés en cachette ! Le
défunt, il est vrai s'était essayé à l'écriture, cela sans succès.
Tous les soirs, après ses cours, il avait composé ses poèmes, utilisant
le petit ordinateur qui se tenait dans sa salle de classe. Il utilisait
Word comme traitement de texte et avait bien du mal à s'en servir. L'école
lui avait fourni une imprimante laser qui, il faut le dire, ne
fonctionnait pas très bien. Les caractères imprimés sur la gauche des
feuilles étaient toujours beaucoup plus foncés que les autres. Mais que
cela ne tienne, il s'en contentait bien. Et le soir, il rentrait heureux
chez lui, lisait immédiatement sa dernière œuvre à sa charmante épouse
qui chaque fois s'émerveillait de ses écrits... L'inspecteur
Ernest Puppa était allé sur les lieux du décès. On avait d'abord cru
être en présence d'un crime. Un promeneur l'avait trouvé sur le bord
d'un chemin de Gex "au creux de l'envers". Il était allongé
sur le sol, la tête en sang, un pistolet dans la main. L'inspecteur
Hector Purbon était également présent. En fouillant dans les poches de
la victime, il avait trouvé une feuille. Après l'avoir lue à voix
basse, il hocha de la tête, puis la donna à son collègue en disant : «
Regarde çà ! Le suicide me semble être la cause évidente ! » Ernest
parcourut attentivement la lettre. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- J’ai
mis fin à mes nuits. Par
un
beau soir d’été, c’est à l’orée d’un bois, que,
soudainement,
cette idée vint à moi. C’était
peut-être la pénombre, c’était peut-être la lumière, ou
tout
simplement quelque chose qui flottait dans les airs. Tout
ce
que je peux dire, c’est qu’après cet instant, mon
être,
ma pensée, ne furent plus comme avant. La
vie
m’avait depuis toujours semblé bien étrange. Je
ne voyais
qu’une solution, c’était de devenir un ange. J’étais
encore
très jeune, je n’avais que seize ans, mais
ne
possédais plus vraiment la pensée d’un enfant. Par
un
beau soir d’été, c’est à l’orée d’un bois, que,
soudainement,
cette idée vint à moi. Le
choix,
le moment ne semblaient pas facile, j’oubliais
donc longtemps ce projet indocile. Puis
le
temps est passé, un peu comme dans un songe. Avec
au
plus profond de moi, ce projet qui me ronge. Par
un
beau soir d’été, c’est à l’orée d’un bois, que,
soudainement,
cette idée vint à moi. L’arme
à mes côtés, tout était trop tranquille. Un
peu comme
si la totalité des bruits, avaient migré en ville. La
douleur
ne fut pas vraiment au centre de mes maux, quand
la
balle brutalement traversa mon cerveau. Par
un
beau soir d’été, c’est à l’orée d’un bois, que
la
vie, soudainement, a pris congé de moi. François
Puremon juin 2000 ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Un
frisson parcourut le dos de notre inspecteur, il regarda tristement son
compère qui lui aussi, dodelina de la tête en signe d’acquiescement.
Il n'y avait aucun doute, l'homme s'était vraiment donné la mort. -------------------------------------------- Une
semaine plus tôt... « Bonjour
Jacques ! -Bonjour,
grommela notre interpellé. C'était
François et Louison qui se promenaient main dans la main, et qui venaient
de tomber nez à nez avec leur cousin. -Comment
vas, on te voit à la réunion de l'école ce samedi ? Demanda François. -Oui,
oui ! Répondit-il. Je n'ai pas trop le temps de vous parler maintenant,
je vous verrai ce week-end ! Jacques
Rémin, continua son chemin après avoir montré aux deux amoureux un
dernier petit sourire forcé. Pour
tout vous dire, il détestait François. Et jalousait son bonheur simple.
Jamais, il n'avait pardonné le mariage de son cousin avec Louison dont il
était resté secrètement amoureux. Il avait décidé de le supprimer et
avait déjà échafaudé un scénario macabre. ---------------------------------------------------- « Mesdames
et messieurs, vous êtes tous cordialement à me suivre dans le préau
pour boire le verre de l'amitié ! » C'est
ainsi que s'exprima le directeur de la petite école primaire. Dans
un brouhaha digne d'une cours d'école, l'ensemble des visiteurs se précipita
à la découverte des petits gâteaux et des boissons rafraîchissantes
qui s'étalaient sur une longue table au milieu du hall d'entrée.
Pourtant une personne était restée dans la petite salle de classe de
Monsieur Puremon. Vous devez vous en douter, c'était bien entendu Jacques
Rémin dont le cœur battait la chamade. Le prélude de son macabre dessein
allait maintenant se dérouler. Il
se dirigea directement vers l'ordinateur de son cousin dont l'écran de
veille diffusait des images d'animaux sauvages. Il sortit de sa poche une
disquette qu'il introduisit dans la fente appropriée. Frappa quelques
caractères sur le clavier, ce qui sembla animer l'appareil. Sur le
fichier document, il trouva ce qu'il recherchait. Il cliqua sur poème.
Une série de fichiers aux noms hétéroclites apparue. C'était bien ici
que son cousin rangeait tous ses poèmes. Il avança l'heure de l'horloge
interne de la machine, puis enregistra le fichier de sa disquette sur le
disque dur dans le fichier des poèmes. Ceci étant fait, il imprima son
texte, plia soigneusement la feuille et la mit dans sa poche, puis remit
l'horloge interne du computer à l'heure exacte. Personne ne s'aperçut de
rien et c'est donc en toute impunité qu'il rejoignit la foule de parents
d'élèves. La suite vous la connaissez, un rendez-vous secret dans un
coin éloigné de la ville. « François,
rejoins-moi
au creux de l'envers, surtout ne le dit à personne, j'ai des problèmes ! » --------------------------------------------------- Ernest Puppa et l'inspecteur Purdon discutaient dans le bureau de la police scientifique du Pays de Gex : « Pauvre professeur, je l'aimais bien ce gars ! J'ai regardé l'ensemble des poèmes qu'il avait enregistré sur son ordinateur, question de vérifier si c'était bien lui qui avait écrit le dernier. Et bien oui ! Ils étaient tous là. Même, l'heure à laquelle la dernière poésie avait été rédigée correspondait bien avec ses habitudes. J'ai fait une copie du tout sur une disquette et j'ai imprimé quelques poèmes pour voir si les caractères d'impression étaient bien les mêmes. Il tendit l'ensemble à Ernest qui observa les écrits en détail. -En effet ! Souligna Puppa en considérant le côté gauche de la feuille ornée de lettres plus sombres que les autres. Il scruta la missive de suicide du disparu et constata la conformité des ressemblances avec les autres textes. -Tout est identique ! Enchaîne Purbon. La même imprimante a tapé le texte et de toute façon le pamphlet suicidaire se trouvait bien mélangé avec les autres. Et dire que cet écrit a été rédigé le soir même de la fête de l'école, regarde la date, l'heure, aucun doute possible ! Notre instit en est bien l'auteur. La mine tristounette de Puppa semblait plongée dans ses pensées. -Il faut que je vérifie quelque chose ! Dit-il soudainement, une lumière de clairvoyance dessinée dans ses yeux. Il se leva et se dirigea en direction de son bureau emmenant avec lui la totalité des documents que lui avait confiés son collègue. Le silence envahit soudainement la pièce, puis, de l'autre côté de la porte, le crépitement d'une imprimante se fit entendre. Une demi-heure plus tard, l'inspecteur Puppa revint avec la certitude qu'il était en présence d'un meurtre. Avec l'affirmation qu'il détenait, retrouver le tueur ne devrait être qu'un simple jeu d'enfant.Pour la solution de cette énigme cliquez ici
|